» Beaucoup de réactions ont suivi l’annonce du score de Marine Le Pen. D’abord créditée de 20 % des voix, elle réalise au final le beau score, un peu inférieur et moins symbolique, de 17,90 %. L’écart le plus surprenant est encore celui qui la sépare de celui qui s’était autoproclamé son principal adversaire, Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier obtient 11,11% des suffrages exprimés.
Face au Front national, plusieurs stratégies ont d’ores et déjà montré leurs limites. La gauche française en a essayé deux, le recours à la vieille antienne de l’antifascisme et la lutte par procuration. La première se heurte à deux obstacles.
Le premier est que l’assimilation entre Front national et fascisme ne fonctionne pas. Déjà caduc au temps de Jean-Marie Le Pen, le rapprochement l’est encore plus depuis que sa fille dirige le Front. Celui-ci s’éloigne de plus en plus des terres de l’extrême droite traditionnelle et rejoint le camp des droites populistes européennes, telle qu’on peut les rencontrer au Pays-Bas, en Suisse, en Finlande. Il relève du « populisme patrimonial », tel que Dominique Reynié l’a défini, couplant critique des élites et défense de la nation vue comme un patrimoine menacé.
Le second est qu’il repose sur la diabolisation des électeurs et des militants du Front national. Or il devient difficile de diaboliser 6,4 millions de personnes – c’est le nombre de ceux qui ont voté Marine Le Pen samedi. Difficile de diaboliser des non-diplômés, des jeunes, des ouvriers, des employés du secteur privé, toutes catégories dont une part significative vote Front national. Difficile, en démocratie, de diaboliser un électorat plus « populaire » que le sien… »
Source: http://election-presidentielle.blogs.la-croix.com/deux-frances-qui-ne-se-parlent-pas/2012/04/24/